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Salomé, la mécanique de la chute et l'effondrement d'un monde

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Salomé sous le signe de la Lune

L'opéra de Richard Strauss "Salomé" est indubitablement placé sous le signe de la Lune. Dès la deuxième réplique, elle est citée comme une prophétie: "Regardez la lune. La lune a l'air très étrange. On dirait une femme qui sort du tombeau."


Salomé - Olivier Py - Onr - Photo:Nys&For

Et il n'y aura pas que cette femme - Salomé - qui va mourir, deux autres hommes aussi, avant elle. L'un parce qu'il l'aime - Narraboth - l'autre parce qu'il ne l'aime pas (ou dit ne pas l'aimer)- Jochanaan. Et toute la pièce va voir la lune et ses effets éclairer cette inéluctable descente au tombeau prédite par le Page d'Héroidade. Pour en arriver à la disparition de la Lune, et même des étoiles et donc à la mort. Mais, c'est pour révéler que "Le mystère de l'amour est plus grand que le mystère de la mort".
Le mystère n'est pas dans le côté religieux qui nous est présenté: La venue du Messie annoncée par Jochanaan (Jean-Baptiste), mais bien dans cette relation qui va au-delà du désir (eros) dans une séduction plus mystérieuse qui va se jouer entre Salomé et les trois hommes qui vont entrer dans son piège. Et surtout avec Herodiade et Jochanaan. Pour Hérode ce sera, tout le monde le sait, la danse, langage du corps sublimé. Et Olivier Py met en scène cette danse, que l'on attend érotique, plutôt comme un passage vers un autre espace, un autre univers: "une expression du sacré, manifestant un cosmos et une hyper conscience". Le côté sexuel est délégué aux tableaux décrivant la décadence romaine. Notre époque pouvant d'une certaine manière mieux s'y comparer - avec un côté "fin du monde"? - que la période de création de la pièce. Même si le sujet - et le personnage - toujours d'actualité - ont commencé à surgir lors de cette fin du "Monde d'hier", au tournant du siècle. Mais les moeurs n'étaient pas celles d'aujourd'hui.


Salomé - Olivier Py - Onr - Photo:Clara Beck

Le mécanique de la chute et l'effondrement d'un monde.

Pour Jochanaan le mystère est dans une séduction ou plutôt une non-séduction, un refus même de la regarder "Je ne veux pas te regarder. Tu es maudite." qui aura l'effet inverse: un coup de foudre violent et profond. Pour en arriver à cette demande de sacrifice pour pouvoir jouir de l'organe qui l'a séduite: la bouche ("Parle encore Jochanaan, ta voix m'enivre") et pouvoir la baiser. Et nous pouvons déceler dans cette scène un autre côté lunatique, la versatilité de Salomé, qui ne se fixe pas et se contredit dans l'objet de son amour face à la tête de Jochanaan, exprimant le doute, le manque de certitude que partage également Hérode à d'autres moments. 
Et tous ces personnages, qui doutent, se contredisent, vont à leur perte ou craignent le futur (Hérode dit dans une de ses dernières répliques: "Je commence à avoir peur") sont la traduction de cette perte des repères et du doute de cette période de fin d'un monde que traduit bien la mise en scène d'Olivier Py. 
La peur, c'est aussi toute une atmosphère, une lumière lunaire - et Bertrand Killy le rend très bien - mystérieuse, sourde, angoissante - qui "fait froid ici" - et un mystérieux "battement d'ailes" qui augure du malheur qui plane et qui s'abat sur la scène.


Salomé - Olivier Py - Onr - Photo:Clara Beck


Il faut aussi saluer l'inventivité et la qualité des décors créés par Pierre-André Weitz, compagnon d'Olivier Py sur de nombreux spectacles déjà - une mention spéciale au décor de la danse des sept voiles à la fois réaliste et irréel pour le palais d'Hérode.



Salomé - Olivier Py - Onr - Photo:Clara Beck



C'est d'ailleurs le lieu qui marque le plus la perte des certitudes et la question du sens, puisque c'est là que les cinq juifs (qu'Olivier Py a étendu aux autres religions) débattent de la réalité du Messie. Et c'est également le moment musical le plus novateur par son traitement atonal. Rappelons que Richard Strauss a créé cet opéra en 1905 et qu'il arrive après Wagner et annonce la musique du XXème siècle. 


Salomé - Olivier Py - Onr - Photo:Clara Beck


Son traitement musical et vocal la contient en germe. Saluons les rôles principaux pour leur performance: Salomé (Helena Juntunen), Hérode (Wolfgang Ablinger-Sperrhacke), Hérodiade (Susan Maclean), Jochanaan (Robert Bork), Narraboth (Julien Behr) ainsi que l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg et la direction de Contantin Trinks (qui sera remplacé par Manfred Mayrhofer pour la représentation du 31 mars). Une mentiont aux artistes chorégraphiques qui donnent d'eux-mêmes: Charlotte Dambach, Clément Debras, Andreas Grimaldier, Régis Kiefer, Jean-François Charles Martin, Ivanka Moizan, Armando Neves Dos Santos et Laura Ruiz-Tamayo).

Après cela le monde peut s'effondrer. Je vous laisse la surprise de le découvrir.



Bon spectacle.

La Fleur du Dimanche

Le Soleil a rendez-vous avec la Nuit après la Pluie

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Un arc en ciel de fleurs sous la pluie, c'est ce que je vous offre aujourd'hui après quelques jours d'absence de soleil... 
On n'est pas maître du ciel, ni des heures me diront certains.

Primevères sous la pluie - Photo: lfdd

En ce jour de passage à l'heure d'été - rappelez-vous, vous vous êtes déjà levé une heure trop tard, il va falloir vous coucher plus tôt même s'il fait jour plus longtemps. Vous êtes perdus ? Le dessin de Philippe Geluck publié le 22 octobre 2012 ne sert plus, étant donné que le passage à l'heure d'été a été avancé d'avril à mars. Mais il faut toujours avancer la montre d'une heure (même en mars) - en ce jour de passage à l'heure d'été disais-je donc, je voulais vous parler de la nuit et de la pluie, et du soleil revenu bien sûr... car tout le monde le sait, "Se coucher tard nuit."

Chatons sous la pluie - Photo: lfdd

Attention, c'est bien "Chatons sous la pluie", à ne pas confondre avec "Chantons sous la pluie" (voir plus bas..).

La nuit, le terme vient, entre autre du mot égyptien "Nout" qui était le nom de la déesse du ciel. Elle était la petite fille du dieu-soleil Atoum. Et elle était à la fois la soeur jumelle et la femme de Geb, le dieu de la terre... Sa mère Shou, pas très sympa ne vit cette union pas d'un très bon oeil et sépara Nout et Gem pendant 360 jours.... Mais Nout joua aux dés avec Thot, le dieu du temps et gagna 5 jours (360 + 5 = 365 !) et prit ces 5 jours pour s'unir avec Gem et avoir 5 enfants - Osiris, Horus l'Ancien, Seth, Isis et Nephtys. Et les larmes de Nout, dieu du ciel, c'est la pluie....

Jonquilles sous la pluie - Photo: lfdd

Nout, en passant par la Grèce, devint Nyx, déesse de la nuit, Nox en latin et puis Nacht, night, nuit, même Nótt, déesse nordique de la nuit:
"Þá tók Allföðr Nótt ok Dag, son hennar, ok gaf þeim tvá hesta ok tvær kerrur ok setti þau upp á himin, at þau skulu ríða á hverjum tveim dœgrum umhverfis jörðina."
Bon, je mets la traduction pour ceux qui ne comprendraient pas:
"Alfadr (Odin - Wotan) prit alors Nótt et Dag, son fils : il leur donna deux chevaux et deux chars, et les plaça en haut dans le ciel en leur enjoignant de chevaucher chaque jour autour de la terre."


Jonquilles sous la pluie - Photo: lfdd

Louis Poterat l'a écrit: "Comme l'Arc en ciel, après la pluie, comme le soleil après la nuit, serais-je celle qui chassera vos peines?"
C'est Georges Guétary qui le chante, sur cette valse en la bémol, opus 39, N° 15 de Johannes Brahms:



En voici les paroles:

La valse des regrets

L'orgue de la nuit

Au clair de lune gémit

La brise fait
De son archet
Chanter la valse des regrets

Mon bel amour
Au bois dormant
Quittez vos rêves troublants
Vous éveillant
Tout doucement
Venez vers moi qui vous attends

Venez vers moi
Il est grand temps
Calmer l'émoi d'un cœur qui bat
Devant l'effroi d'une prière vaine

L'ombre s'alanguit
Des formes glissent sans bruit
Et du passé
Vestiges usés
Nos souvenirs s'en vont danser

Comme l'Arc en ciel après la pluie
Comme le soleil après la nuit
Serais-je celle
Qui chassera vos peines?

L'orgue de la nuit
Au clair de lune gémit
Dans mon coeur lourd
Qui n'attend plus que votre amour."

Et ici une version interprétée par Françoise Hardy et Hélène Grimaud:




Restons avec Françoise Hardy avec le Soleil:

Et c'est toujours lui le soleil 
qui fera mes réveils 
chaque matin 
soleil d'hiver ou d'été 
il voit les amours passer 
et les chagrins.





Françoise en duo avec Alain Souchon:




Et une version de Sunshine, l'original de Soleil par Sandy Alpert:




Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

Christophe fait le Yanne au café Brant: Tous embarqués dans la Nef des Fous

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Christophe Feltz et son Théâtre Lumière qui fête ses vingt-cinq ans cette année, a un côté ombre et un côté lumière:
D'un côté, il met en scène des auteurs contemporains, et c'est son versant lumière. Il partage cet éclairage humaniste des grands textes du théâtre: Harold Pinter, Vaclav Havel, Sam Shepard, Tennessee Williams, August Strindberg, Philippe Madral, Robert Pinget, Nathalie Sarraute, Jean Tardieu, David Mamet, Arthur Schnitzler, Paul Auster, Eugène Ionesco. Il les amène à la scène pour "explorer une certaine sensibilité théâtrale et c’est bien ce type de théâtre « humaniste » ou « de l’intérieur » qui nous touche, nous intéresse et nous fait vibrer". Lumière sur la scène.


Yvette Stahl - Christophe Feltz - L'Etre Urgent - Harold Pinter - 1992

D'un autre côté, une sensibilité qui l'amène vers un univers mélange de chansons, de cabaret, de poésie, d'absurde parfois et d'humour sera plutôt le côté ombre, ombre des projecteurs et des lumières du music-hall ou celle des petites salles, où le comédien, seul ou avec un ou deux acolytes, parfois un piano ou un autre instrument vont être plus proches du public, confrontés à la réaction immédiate, plus brute, plus contrastée, miroir du jeu du comédien en équilibre sur la salle. Ce sera le côté nocturne du café-concert, comme par exemple le Café Brant, lieu prédestiné puisqu'à la fois café, mais aussi esquif de fous (ou de clowns) navigant dans la nuit strasbourgeoise à la rencontre des clowns ou des fous du roi.
Une fois par mois, le mercredi ce sera lecture conviviale et culturelle dans une ambiance cosy.




Et la dernière de la saison 2016/2017, ce mercredi 30 mars, après, entre autres Boris Vian, Raymond Devos et Jacques Prévert, aura été l'occasion de redécouvrir une facette un peu oubliée (malheureusement) de Jean Yanne: Ses textes - et quelques chansons.
Parce que Jean Yanne, plus connu comme comédien et réalisateur surtout, homme de radio - il a commencé comme journaliste mais très vite il fera du cabaret et de la radio avec Jacques Martin, Roger Pierre et Jean-Marc Thibault et Pierre Dac. Mais cet homme, dont l'image au cinéma de Français moyen, râleur, vachard, égoïste et roublard va lui coller à la peau, va cultiver cet esprit critique, anar et caustique - c'est lui qui est a l'origine du slogan "Il est interdit d'interdire" - et ne va pas se priver de faire de l'humour "vache".



C'est cet humour-là que Christophe Feltz va distiller sur scène, en savant dosage et dans la bonne posologie, au point justement que le public, sollicité et confronté à son beauf en miroir - même si le public présent ne se considère pas comme tel - va prendre plaisir et rire de ces autoportraits et séquences de vies ou aphorismes que nous sert sur un plateau le comédien plein d'entrain alors que derrière lui, comme sur scène, sur le trottoir (ah les trottoirs, promis par tous les candidats aux élections) passe un serveur - un vrai - avec son plateau rempli haut au dessus de la tête, comme dans un film comique, Buster Keaton involontaire. Et l'on rit, naïf et simple à l'écoute de ces "conneries", parce que comme le dit Jean Yanne: "La connerie, c'est comme le judo, il faut utiliser la force de l'adversaire".
Mais ce ne sont pas que des conneries, et l'on se rend compte que Jean Yanne a une sagesse de vieux gourou quand il nous apprend que:
"Il faut commencer à se méfier le jour où l'on a plus de souvenirs que de projets." et qu'"Il faut faire des enfants quand on est vieux, parce qu’on les emmerde pas longtemps". 
D'ailleurs "Il faut commencer à se méfier le jour où l'on a plus de souvenirs que de projets."
C'est là que l'on se dit qu'"En fait l'important ne serait pas de réussir sa vie, mais de rater sa mort."

Mais pour ne pas finir sur une pensée triste, je vous laisse une porte de sortie:
"Il faut qu'une porte soit ouverte ou d'une autre couleur".

Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche

P.S. Pour vous remettre en mémoire le talent de Jean Yanne, à défaut - ou en attendant d'aller voir le spectacle de Christophe Feltz (Restez au courant des prochaines dates sur son site ou en lui envoyant un mail : info@theatre-lumiere.com) je vous propose un pot-pourri sellectionné de chansons de Jean Yanne.

D'abord une de celle entendue dans le spectacle (vers la fin bien sûr): Si tu t'en irais:





Une autre découverte à cette occasion, version ingnorée de la Marseillaise: Saint Rock





Le Tube que vous avez peut-être entendu quand vous étiez très petits (c'était juste après mai 68) Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil





Une chanson coquine et courte: Si tu n'en veux pas



Et une encore plus courte (écoutez bien, elle est déjà terminée:
Choucroute Saucisse (hommage à l'Alsace ?) - Pas de quoi en faire un procès): 





Un petit intermède publicitaire - quelques fausses pubs, autre talent de Jean Yanne - extraits de son film "Je te tiens tu me tiens par la barbichette"





Et pour finir, un extrait du film "Moi y'en a vouloir des sous" avec une prestation du groupe Magma qui est passé fin de l'an dernier à la Laiterie à Strasbourg dans le cadre de sa tournée du 45ème anniversaire:



Bon Yanne

Article 1

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La Fleur du Dimanche a fait un voyage express en Guyane dans l'avion des ministres.

En espérant revenir pour dimanche...

Pour patienter quelques fleurs exotiques sur la grève guyanaise...






Bon samedi

La Fleur du Dimanche

Cerisier de Cayenne ou du Japon - Poisson d'avril ou poisson-chat

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En avril, surtout le premier, on attrape les gens avec un fil et on y trouve un poisson.
Pour ne pas déroger à la tradition - n'est-ce pas Roger ? - je suis allé à la pêche aux fleurs du bout du monde et dans mon filet, j'ai attrapé une brassée de fleurs exotiques (Merci à Cathie A. pour son aide involontaire et amicale - Je lui en suis redevable et espère qu'elle pourra bientôt revenir de Guyane) et quelques "prises" qui ont "mordu"à l'hameçon (je m'excuse auprès d'elles et d'eux, ils (elles) en riront je l'espère.

Mais avançons, car comme dit Rosso Blu: "Seul le poisson mort va dans le sens du courant" et cela m'a permis de trouver trois autres pistes:
Le vrai poisson rouge est barbu et c'est un mâle; il s'appelle Barbu cerise, le voici:



C'est bien sûr lui qui est en bas de la photo.
En Guyane, il y a aussi des cerises, et elles s'appellent "Cerises de Cayenne" en voici:




J'ai égalemement découvert une citation d'
Armand (ou Paul-Armand) Silvestre que je vous livre ici: 
"En avril, sous les branches Au feuillage frileux, En cherchant des pervenches J'ai trouvé tes yeux bleus."

Mais le premier avril, je n'ai pas trouvé que des poissons, et des cerises, mais aussi des photographes qui "mordaient"à l'hameçon des cerisiers du Japon.
Je n'ai pas pu m'empêcher de les "attraper" aussi (les photographes et els fleurs. Que voici: 


Les photographes des cerisiers du Japon en fleurs - Photo: lfdd


Les cerisiers du Japon en fleurs - Photo: lfdd



Les cerisiers du Japon en fleurs - Photo: lfdd

Et pour finir en 
chansons, un hommage via Jacques Higelin au peuple de Guyane et aux autres qui essaient de défendre leurs droits - et pour certain leur droit de retour en France...

Cayenne c'est fini de Jacques Higelin




Cayenne c'est fini

Pas d'veine trop de soucis
Cayenne c'est fini

Pas de lettre de mon amie

Ce n'est peut-être qu'un oubli
Cayenne c'est fini
Y'en a qui s'aiment jusqu'au martyre
Où y a d'la chaîne y a pas d'plaisir
Les matons m'ont maté
J'ai plus d'quoi me r'lever

Cayenne bon bon bon bon

Cayenne bon bon bon bon j'ai compris
Cayenne bon bon bon bon c'est fini
Cayenne?

D'puis l'temps qu'j'attends ma r'mise de peine

Y a d'la gangrène dans mes souv'nirs
Vaut mieux en finir quand ça traîne
J'ai pas envie d'moisir ici

Cayenne c'est fini

Cayenne c'est bien fini

Allez les mecs? au goulot

Hey les mecs? au goulot !
et qu'ça saute !

Cayenne c'est fini

J'emmène loin d'ici
La mauvaise graine de mes soucis
Qui a fleuri à Cayenne

Cayenne captivité pas bon

Cayenne tentative d'évasion
Cayenne la prison quadrillée
Cayenne nické par les képis
Cayenne des matons décatis
Cayenne quasiment déphasé
Cayenne plaidoirie kamikaze
Cayenne l'avocat dégoûté
Cayenne lui manqué quelques cases
Cayenne système pénitencier
Cayenne condamné l'accusé
Cayenne à purger lourde peine.

Et je vous souhaite de réussir votre journée, après avoir écouté la deuxième chanson blues du grand Jacques:  Encore une journée d'foutue 

 


Je ne sais pas ce qu'il m'a pris ce matin
Quand je me suis réveillé
Je me voyais déjà parti sur un voilier
Dans les pays lointains
Au bord d'une plage avec une belle fille
Qui m'bat à la nage et qui me déshabille
Pendant que j'gambille
Autour d'un poisson chat
Est-ce que t'entends ce que je vois ?

Aujourd'hui pas moyen de s'arracher
À cette putain de flemme
Ma tigresse toute auréolée de ses tresses
Me caresse la couenne
Quand elle a peur de vivre ou de mourir
Je m'arrange toujours pour la faire souffrir
Jusqu'à ce qu'elle pleure 
Qu'elle pleure de rire
Dans mes bras.


Allez, profitez-en pour regarder les baleines passer...
Bon Dimanche


La Fleur du Dimanche


Baal au TNS: dans la cage du hamster, sous le étoiles

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Baal inscrit dans son époque - et la nôtre

La version (la deuxième, celle de 1919) de Baal choisie par Christine Letailleur pour son spectacle donné en ce moment au TNS à Strasbourg est peut-être la plus brute, la plus nature, la plus directe et vivante des pièces de Berthold Brecht. C'est, après un premier jet écrit en 1918, et donc son remaniement en 1919, la première vraie pièce qu'il ait écrite, à l'âde de 21 ans (il est vrai qu'à 15 ans il avait écrit une pièce en un acte "La Bible") et dans laquelle il va mettre toute l'énergie de sa jeunesse et sa passion de la poésie et de la littérature.


TNS - Baal - Brecht - Christine Letailleur - Photo: Jean-Louis Fernandez

D'ailleurs, pour cette version, l'ouverture, "le Grand Choral" placé ici en début pose les bases du projet: On y voit Baal, fonctionnaire municipal et poète invité dans les salons de la bourgeoisie énoncer son programme et sa filiation: premièrement, devenir aussi grand que Wedekind, Büchner et les grands poètes français (Brecht s'inspire à la fois de François Villon et du couple Verlaine et Rimbaud pour les deux personnages Baal et Ekart dans sa pièce. Deuxièmement, dynamiter l'ordre établi, autant le pouvoir que l'argent et le sexe.
Vaste programme qu'il va donc systématiquement mettre en pratique et qui par certains aspects ressemble furieusement à notre époque.


TNS - Baal - Brecht - Christine Letailleur - Photo: Jean-Louis Fernandez

Se cogner contre les murs et cogner sur les conventions.

Baal tout au long de la pièce, en trublion anarchiste va systématiquement démonter les relations sociales et se jeter dans le plaisir du sexe, dans toutes ses catégories - la femme marié, la jeune vierge amoureuse et, à priori, fidèle, la jeune fille romantique, la prostituée - dans un cycle sans fin et sans issue. Il va, tout au long de la pièce s'enfermer dans un cercle infernal en s'excluant au fur et à mesure de la société, du travail, du social du bistrot, de la ville et même de la nature. La scénographie et le décor, sorte de cage dans laquelle les protagonistes tournent sans comme des écureuils ou le jeu des entrées sorties des coulisses indiquent bien ce chemin sans issue vers lequel tend la pièce.


TNS - Baal - Brecht - Christine Letailleur - Photo: Jean-Louis Fernandez

Un film sombre et lunaire

Si l'on considère aussi que la pièce est sous le signe de la lune et du feu : Du "générique" de début rouge à l'incendie de la fin, et toutes les scènes relatives à la nuit et la lune, ainsi que les cris de bêtes sauvages, le mauvais rêve nous emporte dans une angoisse croissante. Rajouté à cela le jeu tendu de Stanislas Nordey en un Baal à fleur de nerf, nous voilà emportés dans une longue errance où, en même temps que l'on découvre la puissance du désir, celui-ci se transforme en pulsion de mort - Freud n'est pas loin - avec les morts annoncées, attendues ou non. Remercions Christine Letailleur, une des rares femmes metteur en scène de nous avoir offert ce spectacle avec sa sensibilité, mais qui nous laisse quand même sonné (rappelons que Brecht aimait la boxe!)


TNS - Baal - Brecht - Christine Letailleur - Photo: Jean-Louis Fernandez

Et pour vous donner envie de voir le spectacle, je laisse la parole à Christine Letailleur qui cite Brecht et prouve que ce n'est pas triste du tout:





Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche


BAAL

Strasbourg au TNS du 4 au 12 avril 2017

Rennes du 21 mars au 1er avril 2017 au Théâtre National de Bretagne
Paris du 20 avril au 20 mai 2017 à La Colline - théâtre national

Amiens les 23 et 24 mai 2017 à la Maison de la Culture


Texte Bertolt Brecht
Mise en scène Christine Letailleur
Traduction Éloi Recoing
Avec Youssouf Abi-Ayad, Clément Barthelet, Fanny Blondeau, Philippe Cherdel, Vincent Dissez, Manuel Garcie-Kilian, Valentine Gérard, Emma Liégeois, Stanislas Nordey, Karine Piveteau, Richard Sammut

Assistanat à la mise en scène Stéphanie Cosserat
Assistanat à la dramaturgie Ophélia Pishkar
Scénographie Christine Letailleur et Emmanuel Clolus
en collaboration avec Karl Emmanuel Le Bras
Assistanat à la scénographie et aux costumes Cecilia Galli
Lumière Stéphane Colin
Son Manu Léonard
Vidéo Stéphane Pougnand

Production Théâtre National de Bretagne - Rennes
Coproduction Fabrik Théâtre - Compagnie Christine Letailleur, Théâtre National de Strasbourg, La Colline - théâtre national (en cours)

Création le 21 mars 2017 au Théâtre National de Bretagne - Rennes


Le décor et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS

      

Celles qui me traversent d'Anne Théron à Pôle Sud: La mer nourricière

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Un rideau géant fait de cheveux ou qui y ressemble s'éclaire et appelle les rêves d'enfant. Des visions fugaces s'en échappent, des bras, deux bras, des fentes, des bouts de corps que l'on attribue à des femmes, apparaissent, disparaissent. 


Celles qui me traversent - Anne Théron - Pôle Sud


La musique, violon, rythme, et des voix chuchotées, intériorisées nous emmènent en nous-même, dans un cocon tendre. Deux jambes, comme l'origine amorcée du monde surgissent. Un morcellement du corps féminin en train de se construire, de se recontruire, par le geste, par la parole, sur l'écran, derrière, se dévoile, émerge et se compose sous nos yeux. 


Celles qui me traversent - Anne Théron - Pôle Sud


Des voix, qui font partie de ces corps projetés en gros plan, bouts rapprochée, très près, dont on essaie de deviner quelle forme, de quelle part sont constituant, nous égrènent des souvenirs, nous parlent de l'intime, citent des consoeurs, tracent une géographie de femmes, nourrissent notre imaginaire d'impressions de féminité.
La musique, le violon, toujours, la contrebasse plus grave, nous porte vers une rêverie qui nous berce, tandis que les corps de deux danseuses se révèlent, devant l'écran et repartent, reviennent, dialoguent entre elles, sont solidaires et indépendantes, se répondent ou s'ignorent. 


Celles qui me traversent - Anne Théron - Pôle Sud

Les deux danseuses, Julie Coutant et Akiko Hasegawe, jouent avec l'écran de cheveux, le font onduler, s'en servent de cachette, se cherchent et se trouvent pour finalement dialoguer dans une complicité complémentaire qu'elles tricotent tandis que les quatre femmes filmées par Anne Théron et dont les mots, les bouts de phrase nous sont distillées dans un flux rythmé et hypnotique nous immergent dans cet univers marin et enveloppant.  


Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche


Pôle Sud - du 4 au 5 avril 2017

A Mulhouse à la Filature du 4 au octobre 2017 

Les "paroles filmées" sont dites par Florence Baschet (compositrice), Aurélia Georges (cinéaste), Elizabeth Prouvost (photographe) et Lydie Salvayre (auteure).

Celles qui me traversent 
CONCEPTION ET MISE EN SCENE : ANNE THÉRON
CHOREGRAPHIE : JULIE COUTANT, AKIKO HASEGAWA, AVEC ANNE THÉRON
COLLABORATION ARTISTIQUE : DAISY BODY
DANSEUSES : JULIE COUTANT - AKIKO HASEGAWA
SCENOGRAPHIEE ET COSTUMES : BARBARA KRAFT
CREATIOON VIDEO : NICOLAS COMTE
CREATION SON : SOPHIE BERGER
CREATION LUMIERE : BENOIT THERON
REGIE GENERALE : MAICKAEL VARANIAC-QUARD
ADMINISTRATRICE : SYLVIE ALQUIER / GINGKO BILOBA

Le Mouvement de l'Air - Adrien M et Claire B: Quand le corps apprivoise le décor

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Quand un informaticien Adrien Mondot, se frotte au jonglage, cela donne Convergence 1.0, un spectacle qui mêle informatique et jonglage et qui révèle un "Jeune Talent du Cirque" en 2014. Ce jeune, plein de talent aime aussi l'émotion, et développe un logiciel eMotion qui va jouer sur la sensibilité du mouvement. En 2011, il rencontre Claire Bardainne, qui est à la fois plasticienne, designer graphique et scénographe et c'est le début de la compagnie Adrien M et Claire B, qui crée spectacles et installations au croisement des arts numériques et du spectacle vivant.  
Depuis, des créations, installations, spectacles et collaborations avec d'autres artistes, en particulier le spectacle Pixel avec Mourad Merzouki qui en en à presque 200 représentations - la pièce est passée à La Filature fin 2015 - jalonnent leur parcours.
Le Mouvement de l'Air, crée en 2105 creuse le rapport de la danse, du mouvement et de l'environnement en images de synthèse.

Le TJP, les Migrateurs et le Maillon accueillent la pièce pour huit représentations pour la plus grand plaisir des spectateurs, grand et petits - il y a aussi des séances scolaires.
Parce qu'effectivement, il y a de la magie et de la surprise sur la scène.


Le mouvement de l'air - Adrien M & Claire B

Le dispositif est on ne peut plus simple: un espace ouvert vers le public délimité par deux écrans et dont le troisième, le sol est également inclus dans la projection d'un univers en 3D graphique.
Cet univers est interactif avec le mouvement des trois danseurs - Rémy Boissy, Farid Ayelem Rahmouni et Maëlle Reymond -
ainsi qu'avec la musique jouée en direct par Jérémy Chartier. Mais il ne fait pas se fier à ce simple dispositif dont la dizaine de variations qui vont être explorées n'en font ni le tour, ni ne nous lassent et surtout n'arrêtent pas de nous déstabiliser dnas nos perceptions et nos repères.


Le mouvement de l'air - Adrien M & Claire B

Chaque tableau amène ses surprises, du premier avec des filaments qui suivent les danseurs au gré de leurs mouvement et au rythme de la musique, au deuxième, où la neige (électronique) s'envole et rebondit en empathie avec le interprètes. Ou encore quand une fumée sortant d'une cheminée imaginaire se plie aux courants d'air des déplacements des trois protagonistes ou quand une flaque de lumière dans laquelle se baigne la danseuse la suit, se déplace et grandit selon ses gestes et s'envole comme un voile par la magie d'un geste aérien. Ou encore pour ce combat entre l'homme attaché et son double graphique, dragon de fils tordus et triturés qui se rétractent pour mieux rebondir.


Le mouvement de l'air - Adrien M & Claire B

Il faut quelquefois avoir le coeur bien accroché pour ne pas être pris de vertiges dans cet univers mouvant, instable constamment en transformation, et l'on se rend compte de toute la maitrise à la fois des interprètes, mais également des concepteurs de ces univers pour nous tromper à ce point, mais nous sommes consentants, en nous faisant croire qu'un grille est un vrai espace - à la limite du maléfique parce qu'il peut nous renverser, mais que les danseurs maîtrisent complètement et arrivent même à les faire basculer. 
ET nous aussi nous basculons dans cet univers hypnotique et nous rentrons dans l'image que les protagonistes apprivoisent pour nous.
La compagnie nous emmène donc pendant un bonne heure dans des contrées oniriques pour notre bonheur, nous secouant aussi de temps en temps, et en nous ramenant à bon port.

En voici quelques images:

 
Le mouvement de l'air / The movement of airAdrien M & Claire B


Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche

En attendant les hirondelles: Gatti, Brecht et Mostar

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Quelquefois, on attend, on guette, on observe et l'on ne voit rien venir. Quelqu'un annonce l'arrivée d'une bonne nouvelle "Les hirondelles sont de retour !". Mais non, pas chez nous, je ne les vois pas.


Fleurs de pommier - Photo: lfdd


Ou une mauvaise nouvelle passée ou à venir et nous sommes tristes, ensemble...
Et quelquefois, on attend que ce que l'on attend arrive, mais cela n'arrive pas. Et on attend...


Fleurs de pommier - Photo: lfdd


Et puis on rencontre un ami qui vous dit "C'est bien ce que tu as écrit à propos du deuil, et comment tu l'as écrit. Et ce qui tu as cité de Maulpoix.*"... Et je réponds: "Oui, mais c'est un hasard, je suis tombé dessus, et puis après cela s'est reproduit." -  Et lui: "Oui, il y a des liens qui se tissent..."
Et j'attends....


Fleurs de pommier - Photo: lfdd



Entre temps, il y a eu Brecht, Baal, et Gatti....


Fleurs de pommier - Photo: lfdd

Et pour finir, parce que je n'ai retrouvé ni la "Chanson des cabinets", ni le petit exemplaire jaune de Baal**, ni "Le Lion, sa Cage et ses Ailes", mais une chanson chantée par Bertolt Brecht (après Baal) et le film d'Armand Gatti sur sa mère "Son nom était Joie" je vous les propose pour aujourd'hui. 
Si la vidéo n'est pas visible ci-dessous, allez directement sur le lien Vimeo":
https://vimeo.com/131104915


Ton nom était joie from LA PAROLE ERRANTE



Je découvre aussi que Gatti est l'auteur de l'expression": "Sous les pavés, la plage", précisément dans sa pièce créée le 15 mars 1968: "Les treize soleils de la rue Saint-Blaise".
Cela vaut bien une citation pour le TVA :

"Ne jamais chercher le prophète
Chercher le combattant,
Seul le combat de chaque jour invente
Seul le combat de chaque jour crée
Ne cherchez pas le prophète
Seul le combat possède le don de la prophétie."
Rosa Collective, Armand Gatti   


Fleurs de pommier - Photo: lfdd


Bertolt Brecht chante son 'Lied von der Unzulänglichkeit menschlichen Strebens' - Musique de Kurt Weill





Der Mensch lebt durch den Kopf
der Kopf reicht ihm nicht aus
versuch es nur; von deinem Kopf
lebt höchstens eine Laus.
Denn für dieses Leben
ist der Mensch nicht schlau genug
niemals merkt er eben
allen Lug und Trug.

Ja; mach nur einen Plan
sei nur ein großes Licht!
Und mach dann noch´nen zweiten Plan
gehn tun sie beide nicht.
Denn für dieses Leben
ist der Mensch nicht schlecht genug:
doch sein höch´res Streben
ist ein schöner Zug.
 Ja; renn nur nach dem Glück
doch renne nicht zu sehr!
Denn alle rennen nach dem Glück
Das Glück rennt hinterher.
Denn für dieses Leben
ist der Mensch nicht anspruchslos genug
drum ist all sein Streben
nur ein Selbstbetrug.

Der Mensch ist gar nicht gut
drum hau ihn auf den Hut
hast du ihn auf den Hut gehaut
dann wird er vielleicht gut.
Denn für dieses Leben
ist der Mensch nicht gut genug
darum haut ihn eben
ruhig auf den Hut."

Pour ceux qui veulent la version française, vous en trouverez une là (ce n'est pas Brecht):
Scène de l'inanité de l'effort humain - L'Opéra de Quat'Sous (K. Weill)



Fleurs de pommier - Photo: lfdd

Et pour conclure, lu ce matin seulement, la conclusion que j'attendais un peu:
C'est Maya Ombrasic, exilée des Balkans au Canada via la Suisse, dans son livre "Mostarghia":
"Les gens réfléchissent beaucoup au malheur des autres, mais le malheur, lui, n'a pas de raisonnement. Il frappe quand il frappe, c'est tout. Il faut apprendre à vivre à ses côtés, en essayant de se foutre de lui. C'est ça l'héritage des Balkans: savoir se foutre du malheur."

Alors, vivons ! 
Et prévenez-moi quand vous verrez les hirondelles....


Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche


* Pour Jean-Michel Maulpoix, je vous renvoie aux deux billets du 12 et du 19 mars 2017:
12 mars Au ras des pâquerettes, fleurs minuscules du dimanche
19 mars : Cueco n'a plus la patate, et Para? Chut ! mais Gracias à la vida et vole l'hirondelle rouge

** Pour Brecht et Baal, voir mon billet sur le spectacle du TNS: 
http://lafleurdudimanche.blogspot.fr/2017/04/baal-au-tns-dans-la-cage-du-hamster.html
  

Pax et Pâques, Poli et Poly, Tic et Tique, Sophie et Marie, que d'oeufs

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Des fois, il suffit d'attendre, une semaine (je vous le disais dimanche dernier) ou 3 jours..... ou moins.
Les hirondelles, à certains endroits étaient déjà arrivées, à d'autres sont arrivées le lendemain, ailleurs sont encore attendues... de mon côté, je les ai vues avant-hier mais pas là où je les attendais, à quelques centaines de kilomètres d'ici...

Et pour d'autres choses attendues, c'est variable également.
Pour la fleur du jour, c'est bien aujourd'hui ! La voilà:


Tulipes de Pâques - Photo: lfdd

Et pour le TVA, après avoir tourné autour des oeufs, de la politique (cacophonie, spectacle, engagement, coups de théâtres ou revirements, c'est dimanche prochain qu'il faut s'engager...), c'est uutour de la philosophie avec l'actualité d'un livre de Frédéric Worms - "Mes maladies chroniques de la démocratie" que je vous propose quelques réflexions.
Je commencerai d'ailleurs par son précédent livre dont le titre "Revivre" serait une voie: "Il y a une modestie inévitable du philosophe, devant les maux qu'il ne peut résoudre, comme devant le peu de bien qu'il peut prodiguer. Ceux qui sont vraiment aux avant-postes, ce sont par exemple les médecins, pas les philosophes. Mais la philosophie n'est pas non plus sans pouvoir, car elle se définit comme la recherche de la vérité destinée à transformer nos vies. Il y a des penseurs qui cherchent la vérité sans transformer les vies, d'autres qui cherchent à transformer nos vies sans la recherche de la vérité. Le philosophe fait les deux."

Tulipes de Pâques - Photo: lfdd

Dans son nouveau livre, il parle d'un sujet tout à fait d'actualité: La démocratie.
Je vous en livre un extrait: "Il faut revenir à ce qui enracine la démocratie dans nos vies, quelque chose comme une origine vitale et morale qui lui est essentielle. Les difficultés qu'elle rencontre ne devraient pas nous surprendre, parce qu'elles relèvent en un sens de la vie humaine, dans ses dimensions morales et politiques du conflit intérieur."
Il désigne cela par le terme de "violation" qui n'est pas "la force en général, mais celle qui vient briser une relation intérieure entre des sujets."Car si "c'est notre père ou notre frère qui nous frappe, cela vient briser quelque chose en nous qui est vital. Ce n'est pas simplement le corps qui est affecté, mais les liens entre nous, qui sont en même temps organiques et affectifs."
Il continue en disant: "Je soutiens que l'idée de justice et les principes de démocratie s'enracinent dans ces expériences vitales. La démocratie s'efforce d'empêcher toutes les formes de violations. Elle ne défend pas seulement ses membres contre toutes les violences extérieures - c'est la première fonction vitale du politique - mais elle s'emploie aussi à les protéger, par ses principes mêmes, des violences qu'ils peuvent exercer les uns sur les autres. Les principes moraux de la démocratie sont aussi des principes vitaux."

Tulipes de Pâques - Photo: lfdd

Et aussi : "L’erreur c’est de poser un but absolu ("la" démocratie) et du coup des obstacles extérieurs qui nous en sépareraient, comme par une sorte d’accident ou de hasard malheureux, sur le chemin radieux de l’histoire. Alors que nous sommes face à une aspisration concrète et aussi face à des obstacles réels, dont chaque dépassement est un progrès partiel, mais absolu, qui définit chaque moment de l’histoire, en sa singularité, et non pas dans le plan d’une histoire universelle. (…) Un moment, oui, avec ses progrès et ses régressions, mais non pas sur le fond d’un "Progrès" ou d’une "Catastrophe" (…). Il faut donc changer notre idée d’histoire, et de la démocratie, ou des principes démocratiques."

Pour conclure, comme une bénédiction urbi et orbi :
"La guerre juste n’est pas celle qui lute seulement contre l’agression, mais celle qui ajoute à ce combat l’idée de la paix à construire, de la création d’une société où l’on puisse de nouveau créer, aimer, habiter le monde."


Tulipes de Pâques - Photo: lfdd

Et pour terminer en chanson, celle de circonstance, trouvée pour Pâques, excusez du peu, celle de Marie, chantée par Gilbert Bécaud - Marie Marie: 




"A Pâques ou à la mi-carême 
Quand je serai libérée 
Lorsque j´aurai fini ma peine 
Ah que j´irai t´embrasser 
Dans notre jardin d´Angleterre 
Les roses ont dû refleurir 
Si tu en portais à ma mère 
Ça me ferait bien plaisir 

Marie, Marie 
Écris donc plus souvent 
Marie, Marie 
Au quatorze mille deux cent 

J´travaille à la bibliothèque 
Je m´invente du bon temps 
J´ai pour amis tous les poètes 
Beaudelaire, Châteaubriand 
Pour nous ici quoi qu´on en pense 
Ils sont vraiment très gentils 

On a du dessert le dimanche 
Du poisson le vendredi 

Marie, Marie 
Écris donc plus souvent 
Marie, Marie 
Au quatorze mille deux cent 

A Pâques ou à la mi-carême 
Il reviendra bien le temps 
Où tu pourras dire je t´aime 
Au quatorze mille deux cent."


Bon dimanche

La Fleur du Dimanche

Les Comédiens du Rhin jouent Botho Strauss: "Il jaunira aussi ce jour"

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Botho Strauss est un dramaturge et écrivain allemand qui a travaillé à la Schaubuhne de Berlin avec Peter Stein. A partir de 1977 il écrit des pièces de théâtre qui posent une vision de la condition - et de la solitude - humaine. Il a été montré en France par Claude Régy mais aussi Luc Bondy et Patrice Chéreau. En novembre 2016, nous avons pu en voir une version de sa pièce "Le Temps et la Chambre" au TNS, mise en scène par Alain Françon.

Grâce aux Comédiens du Rhin et au travail d'adaptation et de mise en scène de Chantal Savre-Kahn au Cube Noir au CREPS à Strasbourg, nous avons la possibilité d'en avoir un nouvel éclairage. 
La pièce "Il jaunira aussi ce jour" est construite à partir du texte de cette pièce de Botho Strauss "Le Temps et la Chambre". Elle travaille sur une dualité, et donne unepièce en miroir.
Dans la première partie nous assistons à la rêverie et l'observation de deux femmes (Chantal Savre-Kahn et Sylvaine Cencig), comme un balancier du temps - physique et mental et météorologique - qui essaient de se raccrocher à la réalité et aux autres. Ils arrivent à happer une passante, Marie Steuber (Apix Salomé Haquin) qui va les rejoindre. Et dans la deuxième partie, nous noous retrouvons dans un espace presque imaginaire où la réalité, le temps et la mémoire vont jouer des tours à une galerie de couples dont les personnages masculins (joués par Damien Buret et Olivier Meunier) vont se retrouver face à cette femme, la même et pourtant chaque fois un autre. 


Il jaunira aussi ce jour - Apix Salome Haquin - Les comédiens du Rhin - Mise en scène: Chantal Kahn - Photo: lfdd

Il faut noter la qualité de jeu de la jeune Apix Salomé Haquin dans ces différents tableaux - les autres comédiens/ennes n'étant d'ailleurs pas en reste, la qualité de la pièce est indéniable. Nous assitons à une série de scènes, essentiellement des duos, comme des voyages dans l'espace-temps, un mille-feuille de situations où la mémoire, le désir, la relation à l'autre sont empêchés sur un mode de burlesque froid mais dont la vision nous réchauffe. Rajoutons l'ingéniosité du décor et des éclairages, la vidéo et la musique qui nous positionnent dans le monde d'aujourd'hui et surtout les superbes costumes tous créés et réalisés par les doigts de fée de Chantal Savre-Kahn. 




Si vous avez envie de passer un bon moment de théâtre, ne ratez pas cette pièce.

Bon Spectacle.

La Fleur du Dimanche   



Il jaunira aussi ce jour
du 19 au 22 avril à 20h30

le 23 avril à 17h00
au CUBE NOIR au CREPS 
9 rue de la Garance

67200 Strasbourg


Valse hésitation et montalbanaise: Oyez la mélodie et un peu de jasmin comme parfum - Au boulot !

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Les indécis, les gens qui doutent, les gens qui ne savent pas, les gens qui décident à contrecoeur, les gens qui choisissent "contre", les gens qui ne choisissent pas. Et ceux qui savent, qui ont choisi... Et ceux qui vont à la pêche aux voix...
Et vous, vous êtes où ?

Moi, je suis dans le jasmin blanc et vous en offre une brassée pour cette belle journée:




Comme c'est un dimanche d'élection - vous ne l'aviez peut-être pas remarqué - je vous offre, non pas des conseils pour voter, mais quelques citations qui n'engagent que leurs auteurs - pluralité des opinions de rigueur.

La première citation est de Simone Weil (1909-1943) et parle des partis politiques:
"Comme si le parti était un animal à engrais, et que l'univers eut été créé pour le faire engraisser."



La deuxième, est d'André Suares (1868-1948). Elle date de novembre 1939 - dans sa Chronique de Caërdal:
"Les peuples vont à la dictature comme au moindre mal. Ils le croient du moins, en quoi ils se trompent: la dictature n'est pas le moindre mal, mais le moindre effort (...) Les peuples sont moins responsables de la dictature que la fausse élite qui la rend nécessaire et les y précipite."

La troisième est d'Octave Mirbeau (1848-1917) dans son livre "La Grève des électeurs" - vous l'avez peut-être déjà lue quelque part:
"Les moutons vont à l'abattoir. Ils ne disent rien, eux, et n'espèrent rien. Mais du moins ils ne votent pas pour le boucher qui les tuera, et le bourgeois qui les mangera. Plus bêtes que les bêtes, plus moutonniers que les moutons, l'électeur nomme son boucher et choisit son bourgeois."

Une quatrième, de H.G. Wells (1866-1946), l'auteur des livres de science-fiction "La machine à remonter le temps" et "La guerre des mondes", dans son livre "Les droits de l'homme ou Pourquoi luttons-nous ?" en 1940 :
"Nous devons nous débarrasser et remplacer tous ces gouvernements par un système mondial.

Lui aussi, comme beaucoup aujourd'hui, voulait "dégager" les politiques en place... il y a du boulot !




En guise de conclusion, je laisse à votre réflexion cette phrase du poète Eric Meunié:

"L'habitude fait le paysage"





Et si vous hésitez, dansez sur une valse de Gus (Gustave-Joseph) Viseur, créée avec Django Reinhard. La voici - Flambée Montalbanaise:




Et la version avec paroles - accrochez-vous - c'est André Minvielle qui les chante - Flambée Montalbanaise - André Minvielle





Oyez la mélodie
Le fond du soir
Un café
Écoutez, c'est le blues
Du coin le Gus y joue
Du biniou
Comme fait Bach
Pour une chanson,
Pucelle aux ailes déployées,
Rame, langue albatros,
Pique et trame au papier
Le cap et la falaise, balèze !
J'écoutais Montalbanaise
Une envolée de braises,
Noyé, je m'eau de vie-gueur
Viseur au coeur, liqueur soeur,
A cloche-pieds, cigarette,
Une bouffée volée yé
Au vent de la postérité.

Allez vas-y va,

Chaloupe ta mélopée
Ma chanson de café,
Charlie passe Parker,
Et l'Gus au biniou
Souffle aussi
Comme Black au sax.
Si le be-bop à valser
Devait sceller vos nuits,
Blues et Polka piquée
Temps,
Tu nous réconcilies
M'entends-tu d'accordéon ?
Monteille c'était tout petit
Le paradis d'été
Sambapathie, dada plouc
On ramait bal d'amour flou
Mais un souffle est dévoilé
Une poussée bleue, d'envie,
M'accroche au coeur
Thank you Viseur.

Et ceux, les "griffe le temps"

Ont mis les doigts de cordes,
Apaches et Django Mississippi
Didi guitare aussi m'a dit
Et Paris loue, Paris prie,
Le tango bord de Marne
Chavire la valsouze
Intemporelle et blues

Goutte à goutte ces divines

My lady valsées,
Filles et femmes tam-tam
Au fil du temps
Funambules et modernité,
Comme on jette à l'eau du calme
Un caillou ricochet,
Par ondes d'ondes là
Passe-passe l'écho
Des papis d'au-delà du top.
Réveillez la mélodie, la chanson des cafés,
Vocalise la bob French,
Scat et valsez one more,
D'oc,
Comme un souffle dévoilé,
Une poussée bleue d'envie,
Accroche au coeur
Thank you Viseur.

Pour vous remettre, une version de Richard Galliano 





Et pour les empêchés et les indécis une chanson d'Anne Sylvestre 6 "J'aime les gens qui doutent": 




J'aime les gens qui doutent

J'aime les gens qui doutent 
Les gens qui trop écoutent 
Leur coeur se balancer 
J'aime les gens qui disent 
Et qui se contredisent 
Et sans se dénoncer 

J'aime les gens qui tremblent 

Que parfois ils nous semblent 
Capables de juger 
J'aime les gens qui passent 
Moitié dans leurs godasses 
Et moitié à côté 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 
J'aime ceux qui paniquent 
Ceux qui sont pas logiques 
Enfin, pas "comme il faut" 

Ceux qui, avec leurs chaînes 

Pour pas que ça nous gêne 
Font un bruit de grelot 

Ceux qui n'auront pas honte 
De n'être au bout du compte 
Que des ratés du coeur 
Pour n'avoir pas su dire : 
"Délivrez-nous du pire 
Et gardez le meilleur" 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 

J'aime les gens qui n'osent 

S'approprier les choses 
Encore moins les gens 
Ceux qui veulent bien n'être 
Qu'une simple fenêtre 
Pour les yeux des enfants 

Ceux qui sans oriflamme 

Et daltoniens de l'âme 
Ignorent les couleurs 
Ceux qui sont assez poires 
Pour que jamais l'histoire 
Leur rende les honneurs 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 

J'aime les gens qui doutent 

Mais voudraient qu'on leur foute 
La paix de temps en temps 
Et qu'on ne les malmène 
Jamais quand ils promènent 
Leurs automnes au printemps 

Qu'on leur dise que l'âme 

Fait de plus belles flammes 
Que tous ces tristes culs 
Et qu'on les remercie 
Qu'on leur dise, on leur crie : 
"Merci d'avoir vécu 
Merci pour la tendresse 
Et tant pis pour vos fesses 
Qui ont fait ce qu'elles ont pu"

En voici une autre version:





Et une version de Loulou, très sensible et émouvante:





Et une dernière de Vincent Delerm:






Bon Dimanche d'élection

La Fleur du Dimanche

Sommaire du mois de mars 2017

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Vous avez peut-être raté un billet de La Fleur du Dimanche en mars, voici le sommaire:

Pour commencer, le sommaire du mois précédent:
Sommaire du mois de février 2017

Et tout de suite, le 1er mars, un article sur le spectacle de danse de Georges Appaix: "Vers un protocole de conversation ?"
Vers un protocole de conversation? de Georges Appaix: la danseur bavard est musicien

Dimanche 5 mars - ce sont les premières violettes !
Premières Violettes, premières emojis, dernier message, Jean-Christophe et Françoise
Les fleurs de printemps et un topo sur les émojis (les petites icônes qui transmettent vos sentiments - depuis leur début jusqu'aux milliers d'aujourd'hui (et des conseils pour tromper les outils d'analyse).
Et pour finir un festival de chansons de Françoise Hardy 
Le temps des souvenirs - 1965 
A quoi ça sert (1968)
Loving you (1968)
Fleur de lune (1970)
Point (1970)
Tu ressembles à tous ceux qui ont eu du chagrin (1971)
Viens (1972)
La question (1972)

Dimanche 12 février :
Au ras des pâquerettes, fleurs minuscules du dimanche
Photo de pâquerettes et de fleurs minuscules...
En TVA, un bouquet de textes de Jean-Michel Maulpoix
En musique une chanson de Souchon : "Au ras des pâquerettes"
Et un hommage à Larry Coryel avec deux morceaux, l'un avec John McLaughlin et Paco De Lucía et l'autre avec Bireli Lagrène, et Al Dimeola 

Trois billets sur des spectacles au TNS et au Maillon:
2666 de Julien Gosselin: le théâtre de l'expérience de la violence
Sombre Rivière de Lazare au TNS: construire des ponts où l'on y chante
Providence d'Olivier Cadiot au TNS: Le ventriloque du cerveau

L'opéra "Salomé" mis en scène par Olivier Py:
Salomé, la mécanique de la chute et l'effondrement d'un monde 

Dimanche 19 février:
Cueco n'a plus la patate, et Para? Chut ! mais Gracias à la vida et vole l'hirondelle rouge
Des photos de crocus qui viennent de fleurir, un texte d'Eric Chevillard sur des écrivains disparus - et un hommage à Henri Cueco, disparu lui aussi, tout comme Angle Para, avec une chanson de lui et de sa mère Violetta: "Gracias à la vida"

Dimanche 26 février:
Le Soleil a rendez-vous avec la Nuit après la Pluie
Des photographies de fleurs sous la pluie, en ce jour de passage à l'heure d'été. Quelques pistes sur le terme de Nuit - nox - not ; et un essai pour chasser la peine: "Comme l'Arc en ciel, après la pluie, comme le soleil après la nuit, serais-je celle qui chassera vos peines?" 
Comme chanson, Georges Guétary et la "Valse des Regrets" et une versions par Françoise Hardy ainsi sue la chanson "Soleil" pour l'appeler, par Françoise Hardy (encore), Alain Souchon (encore) et Sandy Alpert (la version américaine..).

Pour finir le mois avec un peu d'humour, le spectacle de Christophe Feltz: 
Christophe fait le Yanne au café Brant: Tous embarqués dans la Nef des Fous
On y apprend qu'"Il faut commencer à se méfier le jour où l'on a plus de souvenirs que de projets."
Et on y entend quelques chansons de Jean Yanne: 
Si tu t'en irais
Saint Rock
Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil
Si tu n'en veux pas
Choucroute Saucisse
- et des extraits de films: 
Je te tiens tu me tiens par la barbichette
Moi y'en a vouloir des sous


Les fleurs du mois de février furent les éranthes, les revoilà:


Eranthes de février - Photo: lfdd

Bonne lecture

La Fleur du Dimanche

Le froid augmente la clarté au TNS: un rêve blanc dans une cave de souvenirs glacés

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Claude Duparfait nous annonce la couleur dès le départ: ce sera un rêve blanc...


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernard - Claude Duparfait - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Et ce blanc va remettre en lumière deux épisodes de la vie de Thomas Bernhard, particulièrement fondateurs: son passage dans un institut national-socialiste à l'âge de treize ans puis dans une cave - magasin d'alimentation dans un faubourg de Salzbourg, "porte de l'enfer". Et curieusement nous passons avec lui d'un univers sombre et étriqué où trône le portrait d'Hitler (une mention à la discrète scénographie et au lumières de Gala Ognibene et de Benjamin Nesme) qui va se retrouver remplacé par un noir crucifix à la blanche et crue clarté de la vérité de la cave. 


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernard - Florent Pochet - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez

Dans la pièce "Le froid augmente la clarté" qui se base sur deux des romans autobiographiques de Thomas Bernhard - "L'Origine" et "La Cave", Claude Duparfait nous confronte et nous inclut à la vie et aux souvenirs marquants de la jeunesse de l'auteur, interprété ici par quatre figures complémentaires, deux hommes (Claude Duparfait et Florent Pochet) et deux femmes (Pauline Lorillard et Annie Mercier), et la présence rassurante, tendre, miroir et guide du grand-père à qui Thierry Bosc donne toute son étoffe et son ampleur. 


Le froid augmente avec la clarté - Thierry Bosc - Photo: Jean-Louis Fernandez


La narration en devient polyphonique et les paroles et les souvenirs rebondissent de l'un(e) à l'autre. On y touve l'amour de la musique comme des grands auteurs (les citations de Montaigne par le grand-père) et la découverte des horreurs de la guerre et des bombardements, comme la solitude de l'enfance dans la "petite pièce à chaussure" pour arriver au courage d'aller "dans le sens opposé" et de se construire soi-même.


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernard - Claude Duparfait - Annie Mercier - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Comme le dit Claude Duparfait: "La parole de Bernhard c'est un flux incroyable, une écriture du souffle. Une forêt de mots, de pensées. C'est aussi une langue extrêmement musicale, et ... Tout comme Bernhard, j'aime la musique comme un fou." ... Et encore "La parole de Bernhard cogne, elle réveille". Et c'est cela qui a poussé Claude Duparfait à mettre en scène cette pièce, après "Des arbres à abattre". La pièce permet "d'aller à la rencontre de mes questionnements sur le monde d'aujourd'hui, qui entre en friction ce qu'a vécu, ressenti, puis écrit Thomas Bernhard." Et cela fait du bien, cette friction entre hier et aujourd'hui, parce qu'il faut aussi se souvenir et lire le monde d'aujourd'hui, qui, comme le dit Thomas Bernhard dans "L'Origine": "La ville est peuplée de deux catégories de gens: les faiseurs d'affaires et leurs victimes."
Reste l'interrogation: que signifie "Aller dans le sens opposé" aujourd'hui ?


Le froid augmente avec la clarté - Claude Duparfait -Pauline Lorillard - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Et pour ne pas être toujours en opposition, comme le dit encore Claude Duparfait: "Qu'est-ce qui nous rapproche aujourd'hui? Ce que nous avons en commun, c'est peut-être l'inquiétude. Qu'est-ce qui peut en naître? Et quel est le rôle de l'écriture, de l'art en génral face à cette inquiétude? Quand je pense au spectacle, parfois c'est l'image d'une étreinte qui me vient, dans tout ce qu'elle peut avoir de consolateur ou d'incongru."

Pour nous consoler, allons au théâtre...

Bon spectacle

La Fleur du Dimanche 


Le froid augmente la clarté

Au TNSà Strasbourg 
du 26 avril au 11 mai
Au Théâtre National de la Collineà Paris
du 19 mai au 18 juin

D'après Thomas Bernhard
Librement inspiré de L'Origine et La Cave
Projet de Claude Duparfait
Avec Thierry Bosc, Claude Duparfait, Pauline Lorillard, Annie Mercier, Florent Pochet

Scénographie Gala Ognibene
Lumière Benjamin Nesme
Son et image François Weber
Costumes Mariane Delayre
Assistanat à la mise en scène Kenza Jernite

Coproduction Théâtre National de Strasbourg, La Colline - théâtre national
Avec le soutien du FIJAD, Fonds d'Insertion pour Jeunes Artistes Dramatiques, DRAC et Région Provence-Alpes-Côte d’Azur

Création le 26 avril 2017 au Théâtre National de Strasbourg

Les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS

Les récits L'Origine et La Cave sont publiés aux éditions Gallimard

Seuls et (ses) Soeurs: De la geste familiale d'aujourd'hui au grand show contemporain

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Wajdi Mouawad est un créateur et un personnage multiple et plein de ressources. Comme le dit wikipédia: "homme de théâtre, metteur en scène, auteur, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-canadien". Cette dernière précision, même s'il est maintenant en France - où il a également passé une partie de sa jeunesse et où il dirige aujourd'hui le Théâtre National de la Collineà Paris (autre "métier" non encore répertorié par l'encyclopédie du net) marque très fortement son oeuvre. Son théâtre, entre autres son cycle "Le sang des Promesses" dont on a vu l'année dernière au TNS "Incendies" est marqué par son destin personnel et l'exil. 
Actuellement au Théâtre du Maillon à Strasbourg, nous pouvons assister à deux pièces, début d'un autre cycle "Domestique" qui va raconter son histoire familiale sous forme de portraits de famille.


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Seuls

Premier opus de la série de cinq à venir (voir Soeurs plus bas), Seuls est un portrait intime, domestique en même temps qu'onirique de la trajectoire d'un exilé qui a perdu ses racines (son jardin dans la montagne au Liban, seul souvenir qu'il a gardé du pays) et balance entre sa famille et son activité professionnelle (une thèse sur un metteur en scène de théâtre - Robert Lepage - qui devrait l'amener à devenir professeur d'université). 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Démarrant par des scènes prosaïques d'une sobriété (échanges téléphonique du quotidien avec père, soeur et professeur, la pièce va creuser l'intime et les relations familiales (les habitudes, les situations bloquées, le besoin de reconnaissance et de considération) et interroger également la parcours professionnel (les métiers rêvés ou choisis) et la création artistique sur des terrains qui se répondent mutuellement: le rapport au père et l'amour (le vrai père encore vivant, mais jusqu'à quand?), les pères (pairs) vivants ou morts qui déterminent la carrière à venir et le père symbolique (celui du tableau de Rembrandt "Le retour du fils prodigue" - et de la bible -Luc 15-21). La pièce, qui oscille entre fiction et autobiographie (avec la constatation de l'auteur qui l'écrit que, dans la réalité, pour la vie "Le brouillon, c'est le propre") finit, après une scène digne des meilleures séances de "stand up", dans un silence créatif et explosif. 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron

A vous d'aller le voir...




Soeurs

Alors que "Seuls" (au pluriel) parle de la pluralité des facettes du personnage principal (le narrateur, l'auteur, le comédien, le fils !), "Soeurs" construit un dialogue entre deux personnages qui pourraient être les deux soeurs de l'auteur, celle de la vie, l'exilée (Nayla Mouawad), et celle du théâtre, celle qui est dans la puissance du langage et du jeu (Annick Bergeron, l'interprète). 


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Cette puissance montrée à travers ses différentes facettes (chanson, négociation, imagination, quotidien, modernité et dématérialisation) traverse des moments d'émotion, de relation, d'interrogation dans une mise en scène imaginative et contemporaine (comme d'ailleurs "Seuls"). La pièce nous parle du monde dans lequel nous vivons, que ce soit des problèmes de politique internationale ou de la déshumanisation des rapports du quotidien. Il touche aussi les questions d'identité, d'exil - même dans son propre pays - et des relations humaines et familiales (l'amour - ou son absence, la reconnaissance, les mots si simple à dire comme merci et que l'on oublie de transmettre,..).


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Annick Bergeron nous rend tout cela très proche et émouvant. Et la mise en scène et la scénographie nous réserve quelques surprises qui arrivent à nous transporter dans des situations (la guerre) que nous ne pensions pas trouver dans ce spectacle. 
Alors, à la question "Qui pourrait croire que l'hiver finirait un jour?" la pièce répond par le bleu du ciel qui suffit à nous faire notre habit de marin. Et nous embarquons volontiers pour la croisière...


Wajdi Mouawad est un conteur hors pair qui arrive à nous transporter dans le domaine du coeur et de la sensibilité avec ses histoires touchantes et émouvantes, avec de moyens très simples quelquefois mais aussi avec tous les médias et les techniques et technolgies d'aujourd'hui: Le trouvère du XXIème siècle.

Bons Spectacles

La Fleur du Dimanche


Seuls

Au Maillon à Strasbourg
du 27 au 29 avril

Texte, mise en scène et jeu : Wajdi Mouawad
Dramaturgie, écriture de thèse : Charlotte Farcet
Conseiller artistique : François Ismert
Assistance à la mise en scène : Irène Afker
Scénographie : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Costumes : Isabelle Larivière
Réalisation sonore : Michel Maurer
Musique originale : Michael Jon Fink
Réalisation vidéo : Dominique Daviet
Construction du décor : François Corbal, Éric Terrien, Yann Malik, Sébastien Grangereau et Benjamin Leroy Sorrin des ateliers du Grand T à Nantes
Générique additif, voix : Nayla Mouawad, Michel Maurer, Isabelle Larivière, Robert Lepage, Abdo Mouawad, Éric Champoux
Musiques additionnelles : Al Gondol de Mohamed Abd-Em-Wahab, Habaytak de Fayrouz, Una furtiva lacrima de Donizetti par Caruso
Texte additionnel : Le Retour du fils prodigue, Luc 15-21, tiré de la traduction de la Bible de Jérusalem
Production : La Colline, Théâtre national / Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie / Grand T théâtre De Loire -Atlantique / Théâtre 71, Scène nationale de Malakoff / Comédie de Clermont-Ferrand, Scène nationale / Théâtre National de Toulouse Midi-Pyrénées / Théâtre d’Aujourd’hui, Montréal / Le Manège, Mons
Remerciements particuliers : Patrick Le Mauff, Robert Lepage, Nayla Mouawad, Abdo Mouawad, Marie-Eve Perron, Alain Roy Remerciements : Lynda Beaulieu, Marie Gignac et le Carrefour International de Théâtre de Québec, Pr. Jean-Pierre Farcet, Dr. Hassan Hosseini neurologue, Georges Banu, Jean-François Dusigne, Marcel Martin, Rose Dibilio ; aux équipes du Théâtre national de Toulouse, du Grand T à Nantes et de l’Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie pour le travail accompli au cours des répétitions

Seuls, chemin, texte et peinture est publié aux : éditions Leméac/ Actes Sud-Papiers

Soeurs

Au Maillon à Strasbourg
du 25 au 29 avril

exte et mise en scène : Wajdi Mouawad
Inspiré par : Annick Bergeron, Nayla Mouawad
Interprétation : Annick Bergeron
Dramaturgie : Charlotte Farcet
Assistance à la mise en scène : Alain Roy
Scénographie et dessins : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Assisté de : Éric Le Brec’h
Costumes : Emmanuelle Thomas
Conception et réalisation vidéo : Wajdi Mouawad, Dominique Daviet
Direction musicale : Christelle Franca
Composition : David Drury
Réalisation sonore : Michel Maurer
Maquillages : Angelo Barsetti
Avec le concours de : équipe technique du Grand T
Décor construit aux : Ateliers du Grand T
Avec les voix de : Annick Bergeron, Christelle Franca, Aimée Mouawad, Wajdi Mouawad
Musiques additionnelles : Je ne suis qu’une chanson de Ginette Reno, Saat Saat de Sabah, Étude Op. 76 nr2 de Jean Sibélius
Production : La Colline, Théâtre national
Coproduction : Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Grand T, théâtre de Loire-Atlantique / Théâtre national de Chaillot, Paris / Théâtre de l’Archipel, Scène nationale de Perpignan / Quartz, Scène nationale de Brest
Résidences de création : Athanor, Ville de Guérande / Grand T, Nantes
Remerciements : Deirdre Bergeron, Léandre Bergeron, Mylène Chabrol, Eveline Desharnais, François Douan, Sylvie Fradet, Abdo Mouawad, Louise Otis, Marie-Eve Perron, Jean- Claude Retailleau, Baptiste Vrignaud

Soeurs est publié aux : Éditions Leméac Actes Sud-Papiers

Médée-Matériau au TNS: ceci n'est pas du cinéma, c'est une vraie expérience théâtrale

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Face à Médée-Matériau, nous nous trouvons confrontés à des questions de traduction, d'interprétation.
Il y a bien sûr le mythe, à l'origine, et ses différentes versions, déjà à l'antiquité, puis les lectures successives par les écrivains, chorégraphes, peintres, cinéastes, musiciens. Et puis il y a cette version, Medeamaterial, un texte de Heiner Müller de 1985 qui, lui aussi a été interprété de nombreuses façons - voir l'Opéra créé par Pascal Dusapin en 1992. Et cette mise en scène d'Anatoli Vassiliev dont la première création - et interprétation par Valérie Dréville - date de 2002 lors de l'Olympiade théâtrale de Moscou et qui a tourné pendant cinq ans (jusqu'à Delphes en 2006). 
Et cette nouvelle version, créé au TNS à Strasbourg le 29 avril 2017, avec la même Valérie Dréville. 
Et il y a le texte, matériau de la pièce, matériau de travail qui est dans ses trois versions: allemande (celui de Heiner Müller), russe (traduction pour Anatoli Vassiliev) et française (traduction de Heiner Müller).
Ce texte, matériau de base de la pièce, le spectateur le reçoit comme un guide-programme qu'il va pouvoir lire au début du spectacle sur un écran de cinéma situé sur scène.
Car le texte, même s'il est court, c'est de cela que nous partons, c'est ce qui et écrit et qui raconte l'histoire. Et quelle histoire ! 


Médée-Materiau - TNS -  Valérie Dréville - Photo: Jean-LouisFernandez

La voici résumée par Valérie Dréville: "Médée a suivi Jason et trahi son peuple pour le sauver. Elle a tué son frère. Cet amour a tenu lieu de patrie jusqu'à la trahison de Jason. Elle est maintenant chassée par lui et par le roi, envoyée en exil. C'est un destin lourd. Comment le surmonter, s'en libérer?
Ce sera tout le travail de la pièce, cette traversée intérieure et symbolique pour faire ce chemin et qui va passer par une sorte de cérémonie chamanique ou rituelle d'exorcisme "d'action émancipatrice" sur elle-même" qu'elle va effectuer. Et que nous allons faire avec elle, comme un voyage. Mais ce n'est pas une croisière. 
Ce voyage auquel elle nous convie, va nous emmener au-delà des mers, seuls, accompagnés quelquefois de quelques mouettes ou de dauphins comme guides, compagnons de voyage, vers le lieu où le soleil se couche et où elle nous enjoindra de la laisser seule, reconstruite et forte. 
Elle y arrive après avoir rituellement "brûlé" la fiancée de Jason, Creüse, son double et offerts, "sacrifiés" ses enfants à leur père, le soleil pour l'immortalité.
Cependant nous n'assistons à un film de voyage en double projection panoramique, parce qu'il y a l'histoire et il y a le texte de Heiner Müller (dont Valérie Dréville dit qu'il est "rempli d'images, de métaphores, d'oppositions. C'est un moteur puissant pour l'acteur"), et effectivement il y a ... l'acteur. 
Donc l'actrice et son travail avec le metteur en scène Anatoli Vassiliev, qui est plus qu'un metteur en scène. C'est un penseur du théâtre qui, dans la suite de l'école de Stanislavski a créé son laboratoire de théâtre expérimenttal - le théâtre École d’art dramatique de Moscou - et dont le travail est basé à la fois sur le geste et sur le matériau son.
Dans Médée-Matériau, le son devient matériau, énergie et traverse le corps et l'espace, la scène, la salle, les spectateurs... 
Sur scène, la comédienne va restituer à la parole ses capacités de révélation. Comme le dit encore Valérie Dréville "S'il faut transmettre quelque chose qui n'est pas matériel, c'est un objet matériel (le son) qui va devenir le conducteur de quelque chose qui n'est pas matériel. .... Il n'est alors plus perçu acoustiquement mais énergétiquement.". 
D'autre part il y a les gestes, les actions du corps, des gestes quelquefois très simples -  mettre de la crème, des compresses sur le visage, le corps,... - qui eux aussi sont profondément inscrits dans la mémoire du corps et que l'acteur va réactiver à chaque représentation pour nous les restituer dans leur dimension cérémoniale, rituelle et guerrière, archaïque. Avec pour objectif, comme le disait Anatoli Vassiliev: "Le but était situé dans l'abstrait: je n'observais plus l'homme pensant les vérités, mais les vérités elles-mêmes... Les acteurs ne se trouvaient plus en lutte mais en jeu.


Médée-Materiau - TNS -  Anatoli Vassiliev - Photo: Jean-LouisFernandez

Un vrai théâtre expérientiel. Qu'il faut avoir vécu... A vous de l'expérimenter.

Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche

Médée-Matériau (MedeaMaterial)

Au TNS à Strasbourg 
du 29 avril au 14 mai 2017

Texte Heiner Müller
Mise en scène Anatoli Vassiliev
Avec Valérie Dréville

Traduction Jean Jourdheuil et Heinz Schwarzinger
Scénographie et lumière Anatoli Vassiliev et Vladimir Kovaltchouk
Vidéo Alexandre Chapochnikov
Costumes, maquillage et accessoires Vadim Andreïev
Composition sonore Andreï Zatchessov
Travail corporel Ilya Kozin
Production Théâtre National de Strasbourg
Nouvelle création le 29 avril 2017 au Théâtre National de Strasbourg
Le décor et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS
Le texte est publié aux Éditions de Minuit

A gauche Nini, à droite Sisi, et le blanc de la fleur n'est pas nul

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En ces temps d'élections (et avant le 1er mai et le muguet), la Fleur du Dimanche vous offre une fleur blanche et un peu d'histoire de la politique en TVA, mais aussi de la poésie et des chansons en "Ni, ni" ou en "Si, si" et bien sûr des fleurs, blanches aujourd'hui - qui ne doivent pas être considérées comme une consigne de vote pour demain:


Fleurs blanches - Photo : lfdd

En guise de TVA, une petite histoire des courants politiques en France, où l'on se demande où nous sommes - où sont-ils ?
A vous d'essayer de trouver la réponse... 

Pour commencer, Alain qui disait dans les années 1930:
"Lorsqu'on me demande si la coupure entre partis de droite et partis de gauche, hommes de droite, hommes de gauche, a encore un sens, la première idée qui me vient est que l'homme qui me pose cette question n'est certainement pas un homme de gauche."

En 1955 Dionys Mascolo commentait ainsi dans un texte intitulé "Sur le sens et l'usage du mot "gauche"" cette phrase d'Alain:
"A la réflexion, l'auteur de ce mot qui exprime si bien la sensibilité de gauche n'était-il pas plutôt de droite? Il parait établi qu'il fut toujours réactionnaire."

André Burguière, dans son livre qui vient de paraître et qui curieusement s'intitule: "La gauche va-t-elle disparaître?" nous dit:
"Ma réflexion est celle d'un homme qui considère la gauche comme sa patrie. En m'appliquant à discerner ce qui donne du sens à la gauche, je cherche à comprendre aussi en parti ce qui donne du sens à ma vie."

Il éclaire d'un commentaire d'actualité l'évolution de la gauche:
"On entre dans la marmite souverainiste avec le romantisme populiste d'un Mélenchon, on en sort ficelé dans l'uniforme du Front National."


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Cela peut être ironique, comme la conclusion de Jean Birnbaum dans l'article "La gauche année zéro" qu'il consacre dans le Monde Littéraire au livre d'André Burguière: 
"Tant mieux, répondront ceux qui ont retenu la leçon de Mascolo: s'il est de la nature de la gauche d'être divisée, alors elle n'est jamais aussi forte que lorsqu'elle est divisée."


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Et pour tenir compte du temps de parole de chaque camp, je citerai Maurice Blanchot qui en 1931 à l'époque où il était de droite, écrivait dans la presse d'extrême droite, en parlant d'Hitler:
"Il cherche seulement à susciter par des moyens électoraux, les conditions politiques qui empêcheront la violence d'être stérile."
Et en 1933: 
"Hitler, en organisant pour le premier mai l'apothéose du travail, cherche à convaincre les Allemands qu'il n'abandonnera pas son programme. Après les violences antisémites, l'ivresse du prolétariat triomphant. Après l'appel à l'orgueil de la race; l'appel à une mystique des forces fécondes et du travail. Le peuple allemand est convié à prendre conscience de tout ce qui peut renforcer sa puissance et assurer son destin."

Quelquefois il est intéressant de mettre en perspective et d'avoir un peu de mémoire... surtout en cette "Journée du souvenir des victimes de la déportation", même s'il ne faut pas ne s'en souvenir qu'un seul jour!


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Un peu de mémoire également pour les chansons du jour, pour le ni, ni, deux Nini, celle d'Aristide Bruant, celle de la Bastille:



Nini Peau d'chien 

Quand elle était p'tite 
Le soir elle allait 
À Sainte-Marguerite 
Où qu'a s'dessalait 
Maint'nant qu'elle est grande 
Elle marche, le soir, 
Avec ceux d'la bande 
Du Richard-Lenoir 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Elle a la peau douce 
Aux taches de son 
À l'odeur de rousse 
Qui donne un frisson

Et de sa prunelle 
Aux tons vert-de-gris 
L'amour étincelle 
Dans ses yeux d'souris. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Quand le soleil brille 
Dans ses cheveux roux 
L'génie d'la Bastille 
Lui fait les yeux doux 
Et quand a s'promène 
Du bout d'l'Arsenal 
Tout l'quartier s'amène 
Au coin du Canal. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Mais celui qu'elle aime 
Qu'elle a dans la peau 
C'est Bibi-la-Crème 
Parc' qu'il est costaud 
Parc' que c'est un homme 
Qui n'a pas l'foie blanc 
Aussi faut voir comme 
Nini l'a dans l'sang. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille.


Comme la mémoire est longue, une version plus récente de Patachou:



La deuxième Nini est de Jacques Higelin, une version avec Arthur pour sa première apparition à la télévision, je vous mets le lien à ouvrir ici:
http://www.dailymotion.com/video/x1qwnyk_jacques-higelin-nini_music


Pour "Si Si, je vous en offre également deux versions, la première, une valse de Juliette Gréco, écrite par Henri Sauguet, pour la musique, bien sûr, les paroles, je ne sais plus, "Si"




Et pour la deuxième version, un peu d'optimisme, et plus de ciel , si : Michel Jonasz : Si, si, si, le ciel:  



Si si si le ciel

L'oiseau 

L'écrit avec deux ailes, 
Les musiciens avec des si, 
Si... si le ciel 
N'était pas si loin d'ici, 
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi

Et même en haut de la tour Eiffel,

On se sent loin des galaxies.

Si... si le ciel

N'était pas si loin d'ici,
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi.

J'ai quitté l'artificiel

Et je t'ai trouvée, Poussy.
Si... si le ciel
N'était pas si loin d'ici,
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi.
Si... si... si le ciel,
Si... si... si le ciel...


Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

Premier Mai: retour du Bonheur...

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En ce premier mai 2017, le souvenir d'un premier mai chaud de 2002 nous revient en mémoire.
Dehors il pleut, mais faisons que le Bonheur soit dans nos coeur, partageons à la fois les fleurs (le muguet est le symbole de Flora déesse des Fleurs) mais aussi l'amitié, l'accueil et contribuons chacun à notre niveau  à l'avenir des fleurs, des plantes, des hommes, de la diversité et de la culture, de la poésie aussi et des chansons. 
Après le muguet du jour, une pensée à Danièle Darrieux, née le 1er mai 1917 et qui fête ses cent ans.

Muguet du premier mai - Photo: lfdd

Danielle Darrieux pour ses 100 ans nous chante le temps du muguet.
Danielle Darrieux - Le temps du muguet:



J'ai caché
Mieux que partout ailleurs
Au jardin de mon coeur
Une petite fleur

Cette fleur

Plus jolie qu'un bouquet
Elle garde en secret
Tous mes rêves d'enfant
L'amour de mes parents
Et tous ces clairs matins
Faits d'heureux souvenirs lointains

Quand la vie

Par moment me trahit
Tu restes mon bonheur
Petite fleur

Sur mes vingt ans

Je m'arrête un moment
Pour respirer
Ce parfum que j'ai tant aimé

Dans mon coeur

Tu fleuriras toujours
Au grand jardin d'amour
Petite fleur

Prend ce présent

Que j'ai toujours gardé
Même à vingt ans
Je ne l'avais jamais donné

N'ai pas peur

Cueillie au fond d'un coeur
Une petite fleur
Jamais ne meurt.


Elle a aussi chanté les fleurs:
Danielle Darrieux chante "Petite Fleur"




Et Les fleurs sont des mots d'amour (1942)




Et en guise de conclusion, une chanson du poème d'Aragon Il n'y a pas d'amour heureux  chanté par Danielle Darrieux:




Parce que l'on peut aimer les fleurs, aimer les hommes, aimer les femmes et s'engager.


Muguet du premier mai - Photo: lfdd


Bon défilé !
Bon Premier mai

La Fleur du Dimanche

Extradanse: Chorus de Mickaël Phelippeau: le choeur en corps et en coeur et encore

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En ouverture d'Extradanse ce soir à Pôle Sudà Strasbourg, le spectacle "Chorus" de Mickaël Phelippeau était tout trouvé pour avoir pleinement sa place dans ce festival qui se promet d'être à la jonction des formes et savoirs populaires de la contemporanéité.

Le chorégraphe qui s'est aussi déjà frotté aux arts plastiques nous présente ici une performance originale construite avec un choeur de chambre à voix mixtes, l'ensemble vocal a capella Campana.
Où comment se faire sonner les cloches en faisant de la polyphonie corse, ou plutôt en chantant une cantate de Bach. La BWV 384 "Nicht so traurig, nicht so sehr" qui dit en substance:
"Nicht so traurig, nicht so sehr, 
Meine Seele, sei betrübt, 
Dass dir Gott Glück, Gut und Ehr 
Nicht so viel wie andern gibt. 
Nim vorlieb mit deinem Gott: 
Hastu Gott, so hats nicht Noth.

Et en résumé: "Ne sois pas trite si Dieu te donne moins qu'aux autres, si tu as Dieu, tu n'as pas de besoin..." 

Mais ne vous inquiétez pas, il ne s'agit pas d'une messe, même si l'apothéose finale est une magnifique choeur polyphonique sous forme de prière et qui prend aux tripes. 
Le spectacle interroge le corps et le coeur. Et concrétise la solidarité d'un groupe de chanteuses et de chanteurs, dans leur rapport les uns aux autres, et au public, ainsi qu'à la représentation, au spectacle, ses règles et ses rituels, qui vont être détournés, transgressés et pervertis.
Nous assistons à de multiples interprétations et variations de cette cantate sous toutes ses formes, en accéléré, au ralenti, en silence ou interprété en solo par une femme alors que l'on entend une voix d'homme ou l'inverse. Ou encore, avec des perturbations comme de n'entendre que, dans une procession chantée, la voix du chanteur qui passe dans un carré de lumière. Ou de voir - et d'entendre six solistes se faire triturer, bousculer, porter, par le reste du choeur et d'entendre les effets de ces manipulations physiques.

Une autre variation sera de faire bouger les vingt choristes et leur chef de choeur de multiples façons, dans une mise en espace ludique et quelquefois humoristique, tout en adaptant l'interprétation à ces mouvements.  Dont par exemple des tableaux animés vivants et chantants, avec la musique qui se retrouve à l'unisson de cette mêlée. 


Chorus - Mickaël Philippeau - Photo: Julie Lefèvre

Les corps eux-mêmes sont très vivants et réels, chaque interprète ayant sa personnalité, son individualité marquée et ses caractéristiques morphologiques qui ne sont ni aseptisées ni noyées dans une masse homogène. Et c'est, au-delà de la musique et du mouvement qui fait spectacle, là où la pièce de Phelippeau nous parle. Et elle parle de nous, de notre fragilité, de nos individualités et nos différences, et du lien, du rapport à l'autre, de la communauté. 
Et, avant de finir, après un ultime trait d'humour (le karaoké), le choeur nous rejoint, nous, public, pour nous inclure et nous intégrer dans une interprétation englobante dans le noir où nous sommes tous unis dans un cocon de musique. Et nous sommes tous en coeur et encore en corps...





Pour le reste des spectacles du festival Extradanse, le programme est sur le site de Pôle Sud ici:
http://www.pole-sud.fr/festival-extradanse/programme


Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche


Chorus
Chorégraphie : Mickaël Phelippeau
Collaboration artistique : Marcela Santander Corvalán
Interprétation :  Ensemble a capella Campana
Sopranos : Fiona Ait Bounou, Rapahële Andrieux, Marielle Khoury, Catherine Quillet, Nicole Tousten, Camille Vourc'h

Altos : Laure Gendron, Chantal Haon, Claudie Pabst, Françoise Poncet, Valentin Roulliat - Haute-contre, Corinne Scholtes

Ténors : Gilles Aumjaud, Thierry Denante, Jean-Paul Joly, Lionel Roux - Chef de Chœur, Renaud Mascret

Basses : Yvon Dumas, Alain Iltis, Fabrice Lebert, Raphaël Marbaud, Jean Ribault, Jacques Vachier
Création lumière : Alain Feunteun
Régie lumière : Abigail Fowler
Son & montage vidéo : Vivian Demard, Romain Cayla

Arrangement musical pour vidéo : Pascal Marius

Kaori Ito relit et relie la fille au père: "Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris

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Kaori Ito, partie à vingt ans de son Japon natal pour l’Europe pour une grande aventure de la Danse à New York, puis dans des compagnies avec Philippe Découflé, Angelin Preljocaj, Sidi Larbi Cherkaoui, Alain Platel ou James Thiérée ou Aurélien Bory (voir mon billet sur le spectacle Plexus). Elle a également fait du théâtre - avec Edouard Baer ou Denis Podalydès, entre autres à la comédie Française ou du cinéma avec Jodorowsky. Elle a créé de nombreuses chorégraphies avec sa compagnie Himé. 

Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris


Quand elle est revenue au Japon à l’occasion de la catastrophe du tsunami, ce fut pour elle ce fut aussi un tremblement, mais intime. De voir sa chambre d’adolescente identique à l’état où elle l’avait quitté, comme un sanctuaire. Elle s’est sentie étrangère dans son propre pays et a éprouvé le besoin d’interroger ses racines et sa famille, surtout sa relation avec son père. Elle qui, culture japonaise oblige, n’a jamais osé interroger son père entreprend de l’interroger, comme une petite fille le ferait quotidiennement. 
Et cela a donné un spectacle en 2015, spectacle avec ce père qui, depuis tourne dans le monde entier et qui les relie très régulièrement: "Je danse parce que je me méfie des mots".

Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris


A l'espace Cardin, où sont décentralisés cerains spectacles du Théâtre de la Ville, les spectateurs sont accueillis dans la salle par les questions – régulièrement mises à jour, celles du spectacle ayant pour certaines trait à l’actualité politique en France – sont diffusées en bande sonore pendant que Kaori Ito se déplace sur scène dans un costume traditionnel et que le père est assis, immobile sur une chaise. Le spectacle sera le trajet de rencontre entre la fille et le père en un raccourci de la vie de Kaori, de sa naissance, son apprentissage de la marche et de la danse, l’abandon de sa culture traditionnelle (elle ôte son costume coloré) pour engager son corps dans la danse et interroger son passé et son père avec une série ininterrompue de questions comme "Pourquoi tu bois du café ? - Pourquoi tu fumes ? – Pourquoi tu n’aimes pas mes copains ? – Est-ce que tu as souffert dans ta vie ? - Pourquoi à Noël tu il y avait des dinosaures à la maison, au lieu d’un sapin ? – Pourquoi au restaurant c’est toi qui payais avec le porte-monnaie de maman ? – Pourquoi tu nous racontais des histoires d’horreur pour nous endormir ?".

Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris


En réinvestissement ce passé, et en rappelant le fait qu’il mettait un disque de musique classique, elle va renouer la relation par l’intermédiaire d’une sculpture sur scène (le père était sculpteur entre autres, il a aussi fait du théâtre autrefois apprendrons-nous dans le dialogue final)  autour de laquelle il commence à tourner puis à danser - un genre de jerk sur une sonate de Scarlatti. Par la musique, par la danse, par les chansons, le  mouvement est engagé, le dialogue, d’abord alterné, va les unir dans des chorégraphies modernes ou même traditionnelles (un air grec : "Pourquoi tu nous écoutais de la musique grecque quand on était petits ?")  pour arriver à un duo sur le même Scarlatti où – même avec un formalisme un peu froid et réservé -  le père et la fille vont se toucher dans une danse de salon. 

Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris


Pour finir dans une fusion dans la joie de la musique, de la danse et des chansons – tout en restant très réaliste vis-à-vis de la vie (A la question de la fille : "C’est quoi vivre ?", le père répond : "Aller vers la mort"). Mais si en y allant, nous pouvons profiter de la beauté de la danse de Kaori Ito  - et de la grâce découverte de son père Hiroshi, allons-y gaiement.

Kaori Ito - Je danse parce que je me méfie des mots - Théâtre de la Ville de Paris

Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche


Je danse parce que je me méfie des mots
au Théâtre de la Ville de Paris - à l'Espace Cardin
Jusqu'au 11 mai 2017

Texte, mise en scène & chorégraphie 
Kaori Ito 
assistant à la chorégraphie 
Gabriel Wong 
dramaturgie & soutien à l’écriture 
Julien Mages 
scénographie 
Hiroshi Ito 
lumières 
Arno Veyrat 
musique 
Joan Cambon & Alexis Gfeller 
conception des masques & regard extérieur 
Erhard Stiefel 
costumes 
Duc Siegenthaler (Haute Ecole d’art et de design de Genève) 
coaching acteurs 
Jean-Yves Ruf
avec 
Kaori Ito (fille) & Hiroshi Ito (père) 
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